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VIKTOR AND ROLF : ABSTRACTIONS COUTURE

Focus

Géométrie euclidienne en mode noctambule ? Ménines constructivistes ? Rubik’s cub fait en robes ? Les couturiers parlent d’« absurdisme », questionnant une nouvelle fois la place du corps au cœur de l’espace, ses tensions, ses dysfonctionnements et ses exagérations, entre bande dessinée et science-fiction.

Avec Haute Abstraction présentée au Grand Hôtel, au cœur d’un ring tendu de moquette violette, le corps fait son cirque, rompu aux exercices de style de deux géomètres de la Haute Couture. 

 

Enchâssé dans un triangle en 3D, mis littéralement en boîte dans un parallélépipède, le corps mutant a toujours été au centre des obsessions de Viktor and Rolf. Là, dans un flashback à « Atomic Bomb » (Automne/Hiver 1998), qui donnait aux bustes des formes de champignons nucléaires, et dans la lignée de « Surreal Shoulder » (Automne/Hiver 2022), cette nouvelle bibliothèque de formes fait coïncider l’art du droit fil avec une impressionnante leçon de géométrie post moderne, la maîtrise millimétrée avec le sens de la performance. 

 

Droites surdimensionnées, fragments, quadrilatères et triangles déjantés rappellent les angles pointus de Gareth Pugh (Carbon Life), autant que les rayures de Leigh Bowery. Bascul vertigineux d’une veste, manches cornets asymétriques, nœuds géants, blouse mappemonde, on ne peut s’empêcher de penser aux costumes de danse qui ont fait de la chorégraphie un terrain d’expérimentations.  Avec en ligne de mire, le défilé de Régine Chopinot et de Jean Paul Gaultier (1985), ceux de Walter Van Beireindonck dans Sous Apparence (2012), de Rei Kawabubo pour Merce Cunningham (1998), et bien avant, les recherches d’Oskar Schlemmer, pionnier du Bauhaus et du ballet Triadique donné en 1922, et dont les costumes géométriques répondaient au « plaisir de jouer avec des formes, des couleurs et des matériaux nouveaux. »