Dans les yeux de Yann Martin / la Grande Dame - Couture Attitude
Drag Race France, et RuPaul’s Drag Race sur la BBC à partir du 9 février. La Grande Dame, c’est une présence, une apparition, une muse de 1,97 cm aux mensurations de rêve : 60-90-60. Esprit couture ? Sans doute tant dans sa manière de poser que de porter le vêtement, de magnifier une attitude, au zénith. « L’esprit couture, oui j’y tiens. C’est l’amour de l’art, de l’artisanat, c’est pousser le concept au maximum. Il n’y a pas de raccourci, tout doit être parfait dans l’exécution, dans l’intention. C’est ce que l’être humain peut faire de plus fou. » Sa mère, sommelière, et sa sœur ont créé une société d’import-export, « Les Grandes Dames ». D’où l’origine de ce nom de scène sublimé par ce corps de liane. « Je sais que j’ai un corps qui intéresse les créateurs, il a une fonction, il peut servir le vêtement, le concept. Cette attitude, je la dois à ma mère, 1,83 cm, classe d’enfer, énergie folle, à dix-neuf ans, elle voyageait à travers le monde. »
La Haute Couture fait corps avec le personnage, au sens de la composition, de la précision millimétrée qui échappe à tous les standards. Qu’il s’agisse de Jean Paul Gaultier, le premier à le faire défiler (justement, pour son défilé d’adieu, en janvier 2020 au Châtelet), Kevin Germanier, Victor Weinsanto, Charles de Vilmorin, Alexandre Blanc, la Grande Dame demeure celle qui « emporte » un vêtement, avec une allure folle. Un coursier à la porte, il vous met en mute, pour rendre un shopping Westwood, et vous reprend, au bout du fil, avec la même élégance. Désormais, sortir en drag ou en garçon, le dilemme est là. « Pour la première fois, j’ai autre chose à vendre » assure Yann Martin, qui sort un premier titre, puis un album au printemps. « J’y parle de choses très personnelles. J’ai composé un premier titre après un summer love, en rentrant de Grèce. C’est une déclaration d’amour au détour d’un show case. »
Six ans après ses débuts, Yann change de cap en douceur. « Je suis artiste avant d’être drag queen, ça touche au dessin, à la mode. C’est beaucoup moins identitaire aujourd’hui. D’un point de vue artistique, cette expérience m’a permis de m’approprier la scène. Aujourd’hui, j’ai assez confiance en moi pour aller au-delà. Je préfèrerais que ce soient mes mélodies qui touchent les gens plutôt que mes longs cils. C’est d’une sensuelle candeur, assez libidineux, c’est très estival. L’album s’appelle DADA, c’est mon surnom, je vais rapper là on ne m’attend pas du tout, c’est oui oui en russe. Je suis à fond dans l’expérimentation. Drag queen, c’est un art queer, ça fait quelque temps que je n’ai plus envie d’avoir cette indulgence avec moi-même, j’ai envie de me mettre en danger, et de faire les choses jusqu’au bout. »
Shootée par Kevin Germanier, l’image de l’album donne le ton. Sans « Kevin, il n’y aurait pas de Grande Dame. D’abord parce que c’est un ami, parce que mes grands moments sont marqués par les vêtements avec lesquels il m’habille. » En version Il, c’est Louis Gabriel Nouchi qui signe son vestiaire. « Il y a quelque chose de surhumain dans le drag, on impressionne, on fait peur. Je me sens plus vulnérable en garçon. J’ai envie que ce soient mes mots qui résonnent. Ce serait tentant de rester dans mon personnage, j’ai envie de m’exposer davantage. »