CULTURE CLASH
Avec 42 défilés, 38 présentations, le calendrier officiel du prêt à porter masculin de l’été 2024, s’annonce haut en couleurs et surtout en émotions.
Dix ans exactement après le triomphe planétaire de « Happy » et de « Blurred Lines », l’arrivée de Pharrell Williams chez Louis Vuitton électrise la scène parisienne : c’est à Jean Imbert, son ami et chef du Plaza Athénée, que l’auteur compositeur interprète, musicien, producteur, directeur artistique, a confié la réalisation d’un dîner géant pour Louis Vuitton au Pont Neuf.
Tout se passe comme si entre les « new comers » (Burc Akyol, Koché), et les marques de retour (AMC, Youths in Balaclava), le « post sportswear », coïncidait avec une de quête plus en plus personnelle : de Paris à Lagos, le luxe passe par l’identité, l’expression de la différence. D’où l’envie, pour chaque maison, chaque créateur, de se redéfinir, à travers une histoire singulière, un projet magnifié par l’artisanat. « J’ai eu envie de réurbaniser le vestiaire, lui redonner un peu plus de posture. Je craignais trop d’être ancré dans une idée d’escapisme. J’ai envie de l’élever pour la sublimer. Je ne suis pas dans la fuite » assure Burc Akyol, finaliste du prix LVMH 2023, et pour la première fois dans le calendrier de la FHCM : « Paris me réappartient, je me sens légitime dans ma double identité » assure ce franco-turc qui réinterprète le « kepenek » manteau des bergers anatoliens, en mode smoking. Après ses échappées belles à Pantelleria en Sicile, c’est au cœur d’un Orient sublimé, qu’il puise l’essence d’une saison marquée par une envie de lignes et de sensualité. Le nom de sa collection ? « Palm Gardens ». « Le vêtement est devenu tellement fonctionnel qu’on a oublié qu’il pouvait être un terrain de jeu, de séduction. Là, Je reprends des codes pour emmener un nouveau public dans mon jardin privé. J’aime l’idée d’installer les choses sans les figer, et créer un cercle infini dans lequel je vais me sentir assez à l’aise »
L’obsession est là. Inspirée par le film « Coco la Fleur Candidat, », Vincent Frederic Colombo, (C.R.E.O.L.E), « garçon des îles quasi autodidacte », promet un « clash entre le costume et le bleu de travail saupoudrés de symboles de brillance ».
En 2019, Youths In Balaclava, un collectif basé à Singapour, et révélé par Dover Street Market, présentait sa collection « Lost in transit ». Pour l’été 2024, « Hybrid Moments » se veut une « un reflet obsédant du monde qui nous entoure. Inspirée par le grain et l'obscurité qui nous entourent, notre collection rappelle brutalement la fragilité de la vie et les dures réalités de notre existence. Un mix and match de treillis camouflage, cuir et denim coïncident avec un engagement personnel : « Notre collection n'est pas seulement belle à regarder - il s'agit de se sentir vivant. Il s'agit de trouver du réconfort dans le chaos et de l'aspect pratique dans l'obscurité. Nous avons dépouillé le glamour et le faste de l'industrie, et ce qui reste est une esthétique déconstruite qui parle de la vérité de notre existence. (…) Notre collection pose la question : "Qui êtes-vous et que représentez-vous ?" Explorez notre collection et découvrez le pouvoir de la mode street style. Nous vous invitons à nous rejoindre dans ce voyage, à embrasser l'obscurité et à trouver la beauté dans le brisement. Parce qu'en fin de compte, il ne s'agit pas de ce que nous portons - il s'agit de qui nous sommes. »
Laurence Benaïm