Dans les yeux de Dior

Léa Tahon

Mécanicienne Modèle 

Atelier Dior Prêt-à-porter Flou Tailleur 

La voix est douce et le regard précis, même derrière ses « lunettes de repos ». Arrivée en juillet 2022, Léa, « mécanicienne modèles », est, à 23 ans, l’une des plus jeunes « main » de la Maison Dior. 

Elle n’avait que vingt ans lorsqu’elle fit ses débuts comme petite main chez Alexandre Vauthier. Enfant, elle dessinait, et puis s’est mise à rêver de ce métier, avec l’obstination qui l’a conduite, pour étudier au Lycée professionnel Flora Tristan de Montereau Fault-Yonne, à faire trois heures trente de trajet aller-retour chaque jour, histoire de se perfectionner avec l’art de la coupe et du tombé... Elle vit encore chez ses parents, et a réalisé une robe bustier sans savoir encore où la porter… 

« A l’école, j’ai appris à coudre à mes servir des logiciels Lectra pour les patronages, à étudier les armures des tissus, toiles, sergés, satin… Le regard ? Cela exige des années » dit-elle « Car l’important, c’est de prendre de la distance. Avoir l’œil toujours frais » Ici, chez Dior, entre les techniques qui permettent de mieux travailler l’art du repassage et c’est une deuxième école ». 

Sur sa machine à coudre, elle a accroché un coussin en forme de cœur tout piqué d’aiguilles. Depuis quelques semaines, les deux ateliers prêts à porter Flou et Tailleur, n’en font plus qu’un : synergie qui permet d’optimiser la mise au point des modèles avant la production, qu’il s’agisse d’ourlets ou de surpiqures, mais également de partager une vision. Avec pour point d’honneur une collection « très Dior », immédiatement identifiable, tant les taffetas bruissant d’imprimés, les tailles fines et les tailleurs évoquent cette atmosphère évoquée par Jean Cocteau dans son Journal en août 53 à la suite d’une rumeur sur le recul de l’âge de la retraite : « Dimanche. Les postes et télégraphes continuent à ne pas fonctionner. Suis toujours malade. Rêves innombrables caricaturant mes angoisses et mes malaises. Pendant ce drame de la France, on voit sur les magazines Christian Dior mesurer une jupe de femme avec un centimètre. On parle de la « guerre des jupes » avec le plus grand sérieux. » (Jean Cocteau, Le Passé Défini, Gallimard)

par Laurence Benaim